mercredi 8 juillet 2009

AFFICHES ET LUTTES SYNDICALES DE LA CGT (suite)

Les verriers de Carmaux

Alors que se tient le congrès constitutif de la CGT, la petite ville ouvrière de Carmaux est une nouvelle fois le théâtre d'une lutte difficile, Déjà, en 1892, les mineurs de la ville avaient dû faire grève pour protester contre le licenciement de leur camarade Calvignac, ouvrier ajusteur à la mine, élu maire et conseiller général.

Calvignac est délégué au congrès de Limoges, où il joue d'ailleurs un rôle important. Aux impatients de la révolution il répond : "l'ouvrier ne peut pas arriver au but futur sans passer par des transitions..."

Mais pour l'heure, ce sont les verriers de Carmaux qui sont en grève. En juillet, leur directeur (il en héritera de l'appellation : "l'infâme Rességier") a licencié deux ouvriers qui se sont absentés pour participer au congrès des Verriers. A dire vrai, ce n'est qu'un prétexte, Rességier a une vieille dette à régler avec le syndicat et, par ricochet, avec Jaurès, qui vient d'être réélu député de Carmaux.

A la grève, il répond par le lock-out et l'appel aux gendarmes. Et le conflit se durcit. Cinq cent familles sont sans ressources. Un grand mouvement de solidarité naît à travers la France, car il devient évident que le patronat veut faire de Carmaux un exemple.

Sur place, en effet, c'est l'épreuve de forces. Affrontements avec l'armée. Grévistes traînés en correctionnelle. L'infâme Rességier se refuse à lâcher prise...

Alors, naît l'idée de se passer de Rességier ! De construire une nouvelle verrerie, appartenant aux travailleurs et dirigée par eux. Le terrain est trouvé à Albi. Les verriers se font terrassiers, puis maçons. Le 25 octobre 1896, la "Verrerie ouvrière d'Albi" est inaugurée. Et Jaurès ne pourra s'interdire une des ces envolées lyriques dont il a le secret : "La classe ouvrière a érigé sa première basilique où les choeurs chanteront non dans le tonnerre des orgues, mais dans la majestueuse mélodie des machines".


La sève



Assemblée générale, rapport, compte-rendu, discussion, vote, candidatures, élections, partage des tâches, contrôle des tâches... Je vous soupçonne d'esquisser un certain sourire devant ce "formalisme" de la vie syndicale qui date de 1896 ! Mais vous avez grand tord de considérer comme "routine" ces formes d'expression de notre tradition démocratique. Elles représentent un acquis précieux (songez seulement à la question : Comment se fait-il que le syndicalisme français n'ait jamais connu les perversions du syndicalisme américain ?) qui nous permet aujourd'hui, avec des modalités concrètes adaptées ou renouvelées, de progresser plus avant...

Chaque militant pourrait dire ce que représente d'efforts et de recherche permanente ce choix d'un syndicalisme toujours plus authentiquement démocratique...

D'autant plus qu'il s'agit de l'enraciner et de lui donner vie au coeur même de ce qui est monument d'autoritarisme et antithèse de toute démocratie : l'entreprise capitaliste !


Le climat social...




Deux affiches, fort différentes quant à leur origine, mais qui toutes deux révèlent dans quel climat "social" commence le XXème siècle (peut-être notre lecteur pensera-t-il qu'un tel climat appartenait au type "persistant" ?).

Les patrons de Vitry-le-François protestent contre le premier embryon de législation sur les accidents du travail... (notons, pour mémoire, que les mêmes ou leurs héritiers protesteront contre la loi imposant le repos hebdomadaire en 1906, contre la loi des huit heurs en 1919, la loi des 40 heures en 1936, les acquis de Grenelle en 1968...).

Les mineurs protestent contre le fait que trois ans après la terrible catastrophe du 10 mars 1916 à Courrières, dont le bilan s'élevait à 1 200 morts, aucune poursuite sérieuse ne soit encore menée contre la Compagnie des Mines, bien qu'il soit prouvé que cette dernière n'ait tenu aucun compte des avertissement répétés du délégué-mineur Simon Rix...

Deux faits qui rappellent combien tous les acquis sociaux seront fruits de la lutte et de la vigilance des travailleurs. Quant à l'attitude du pouvoir, le mouvement syndical n'aura que trop de preuves, dès ce début de siècle, qu'elle peut jouer le rôle, selon l'expression imagée de nos camarades mineurs, du "chien de garde du capital".

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